Elles ont toutes été témoins d’événements tragiques ou heureux : des exécutions, des manifestations, des festivités, des bouleversements politiques sans précédent. Certaines abritent des monuments historiques, d’autres sont des lieux de rendez-vous populaires, où vous pourrez vous reposer ou boire un verre tout en observant d’un œil amusé les marchands ambulants et autres artistes de rue.
Certaines ont traversé les siècles, d’autres ont été détruites, puis reconstruites. Certaines sont à voir de nuit, d’autres au crépuscule, sous un soleil de plomb ou sous un manteau de neige. Mais toutes vous raviront à coup sûr…
Times Square, New York – Etats-Unis
Jusqu’en 1904, Times Square était encore appelé Longacre Square. Ce quartier de Manhattan, dont l’épicentre se trouve au croisement entre la 42e Rue et Broadway, ne reçut son nom définitif que lorsque le New York Times y installa ses bureaux : l’éditeur de l’époque, Adolph Ochs, persuada le maire de renommer la place en l’honneur du journal ! Il n’imaginait pas à l’époque que ce nom serait un jour célèbre dans le monde entier…
Times Square est l’un des visages emblématiques de New York. Un lieu de rassemblement populaire, où quelque 365 000 personnes passent chaque jour et où chaque année les New-yorkais fêtent le passage de la nouvelle année. Au début du XXe siècle, près de 300 spectacles étaient joués chaque année dans ses 70 théâtres. Deux millions de personnes s’y rassemblèrent le 14 août 1945, après la capitulation du Japon.
Après la guerre, Times Square connut une longue période de décadence. Les sex shops, les cinémas pornos et les boutiques de souvenirs bon marché y poussèrent comme des champignons. Dans les années 70, Times Square avait la réputation d’être un coupe-gorge. Les films Macadam Cowboy ou Taxi Driver illustrent cet aspect sinistre du quartier.
Avec la politique « tolérance zéro » menée par Rudolph Giuliani dans les années 1990, Times Square renaît de ses cendres. C’est à nouveau l’un des endroits les plus effervescents de New-York, « la ville qui ne dort jamais ». Depuis 2009, la zone est piétonne entre le 42e et la 47e Rue. Les écrans publicitaires géants diffusent un flot d’images 24h/24 et illuminent tout le quartier le soir venu… Un spectacle extraordinaire à ne pas manquer !
Zócalo, Mexico – Mexique
D’une grande unité architecturale, le Zócalo, situé au cœur du Vieux Mexico, est une des plus belles places du monde, la troisième par la taille après la place Rouge de Moscou et la place Tian’Anmen de Pékin, et l’une des plus anciennes. Rien que ça.
Il aura fallu moins de 3 ans pour que Tenochtitlán, l’ancienne capitale des Aztèques, soit détruite et remplacée par Mexico, une ville coloniale d’inspiration espagnole. Les pierres des pyramides servirent à paver l’esplanade et à construire les églises et les nouveaux édifices. Aujourd’hui encore, les sous-sols du centre historique sont truffés d’anciens temples, de palais et autres monuments aztèques. Il y en aurait au moins 40 dissimulés sous nos pieds…
Tous les temps forts de l’histoire mexicaine se jouent ici : les manifestations politiques ou syndicales, mais aussi les événements culturels et sportifs. Sans oublier le fameux cri poussé par le président de la République depuis le palais présidentiel au moment de la fête de l’indépendance : « Viva Mexico ! Viva Mexico ! Viva Mexico ! ». Côté nord, entre la cathédrale et le Templo Mayor, se regroupent chaque jour marchands ambulants et groupes de danse folklorique.
Au fait, saviez-vous que le véritable nom du Zócalo est « plaza de la Constitución » ? Le mot « zócalo », qui signifie « socle », fait allusion à la base d’un monument qui devait se dresser en son centre, et qui ne fut jamais achevé.
Plaza de Armas, Cuzco – Pérou
Bâtie à 3 400 mètres d‘altitude, la ville de Cuzco est l’un des joyaux d’Amérique du Sud. Au XVIème siècle, cette ancienne capitale inca fut détruite en grande partie par les Espagnols qui y édifièrent leurs propres monuments. Bordée par la cathédrale et la Compañía, chefs-d’œuvre de l’architecture catholique, la Plaza de Armas pourrait prétendre au titre de plus jolie place coloniale du Pérou. Elle fut construite sur un ancien espace cérémonial inca, qui était certainement entouré de prestigieux monuments…
Le passé de la Plaza de Armas n’est pas rose : c’est ici que fut écartelé le dernier chef inca, Tupac Amaru, en 1572. Son corps fut démembré et sa tête exposée sur la grande place. Sa femme, ses enfants et tous ses partisans furent également exécutés. Pour noircir davantage le tableau, Tupac Amaru II, qui se rebella contre les conquistadors, y mourut lui aussi en 1780.
Autant d’évènements funèbres qui ne nuisent pas à la beauté des lieux. Toutes les manifestations importantes du pays s’y déroulent. Le soir, sous les arcades, les petits marchands d’artisanat déballent leurs baluchons. Incontournable, donc. Mais également idéal pour faire une halte au soleil…
Plaza de Mayo, Buenos Aires – Argentine
La Plaza de Mayo est l’âme de Buenos Aires. Il s’agit du tout premier endroit où s’installèrent les Espagnols à leur arrivée sur ces terres hostiles. Depuis, elle a vu se dérouler les principaux événements qui ont marqué l’histoire de la ville.
Son nom est un hommage au 25 mai 1810, jour de la formation du premier gouvernement argentin indépendant, après l’expulsion du vice-roi espagnol et de sa suite par les « Porteños » (habitants de la ville). Cette date symbolique est gravée sur l’obélisque de Mayo, au centre de la place. C’est sur cette place que se trouve le palais de la présidence de la République, la casa Rosada (maison rosée).
Son rôle historique fut majeur : elle connut les grands rassemblements de foule au moment du péronisme, les marches des mères des disparus sous la junte militaire (les célèbres « Folles de Mai ») qui durèrent de 1976 à 2006, les défilés des partisans de la guerre des Malouines (1982), les grands rassemblements de soutien à la démocratie au début des années 1980… ou encore les attroupements spontanés à l’issue d’un match de foot victorieux !
Place de la Concorde, Paris – France
Inutile de la présenter. La place de la Concorde, située entre l’avenue des Champs-Elysées et le jardin des Tuileries, est l’un des lieux emblématiques de Paris.
Cette place fut construite au XVIIIe siècle, afin de recevoir une statue équestre à la gloire de Louis XV. Le peuple, pas franchement emballé, chantait alors : « La vertu est à pieds et le vice à cheval ! ». On construisit aussi deux bâtiments à colonnes, inspirés du Louvre, sur le côté opposé à la Seine. Ils abritent aujourd’hui l’hôtel de la Marine et l’hôtel de Crillon. En 1794, on installa à l’entrée des Champs-Elysées les chevaux de Marly (les originaux sont aujourd’hui à l’abri au Musée du Louvre). Quant aux fontaines, elles ne furent mises à leur place qu’au XIXe siècle, tout comme l’obélisque et les statues des huit principales villes de France.
Sa dénomination n’a cessé de changer au rythme des bouleversements politiques du pays. La place Louis XV devint successivement place de la Révolution, puis place de la Concorde, place Louis XVI, place de la Charte… De même, elle fut ornée tour à tour par la statue de Louis XV (détruite en 1792), la « statue de la liberté » (une autre !), la statue de Louis XVI et l’obélisque de Louxor.
La place de la Concorde servit de décor à de nombreux moments historiques, tantôt joyeux, tragiques ou glorieux : l’exécution de Louis XVI, puis celle de Robespierre, les émeutes des ligues d’extrême-droite le 6 février 1934, la grande manifestation gaulliste du 30 mai 1968… En 1993, l’obélisque fut même revêtu d’un préservatif géant à l’occasion de la journée mondiale du sida !
Un peu d’histoire de France concentrée sur une seule place, en somme.
Place Stanislas, Nancy – France
D’abord, un peu d’histoire : en 1738, Louis XV pistonne son beau-père, Stanislas Leszczynski (qui vient de perdre son boulot de roi de Pologne) pour le poste de duc de Lorraine. Bien sûr, c’est un choix stratégique : Stanislas a 60 ans, et il est prévu que la France récupère la Lorraine à sa mort… Mais le vieillard s’accroche et règne pendant près de 30 ans, passant du rôle d’usurpateur à celui de bienfaiteur. Il instaure par exemple un enseignement public, et fournit aux Lorrains des consultations médicales gratuites…
En 1751, Stanislas décide de faire aménager une place royale à la gloire de son gendre Louis XV. Mais les militaires ne veulent pas d’une place entièrement fermée. Sécurité oblige ! Les magnifiques grilles forgées par Jean Lamour devinrent célébrissimes, et valurent à Nancy son surnom de « Ville aux Portes d’Or ».
Les autres monuments ont attaché moins d’importance à ces contraintes : hôtel de ville au sud, pavillon Jacquet à l’ouest (qui héberge aujourd’hui deux cafés et le Musée des Beaux-arts), opéra de Nancy et Grand Hôtel à l’est. Sans oublier les deux fontaines de Guibal : Amphitrite et Neptune. Au centre de la place trônait une statue de Louis XV, détruite à la révolution et remplacée par celle de Stanislas en 1831.
Grand-Place, Bruxelles – Belgique
« La plus belle place du monde », écrivit Victor Hugo. Ce qui frappe au premier coup d’œil, c’est une apparente cohésion architecturale alors que se confrontent des éléments très disparates : en dehors des maisons construites après 1695, l’hôtel de ville est du gothique tardif et la maison du Roi une construction néogothique du XIXe siècle. Elle est bordée par les maisons des corporations, dont les façades rivalisent de beauté et d’exubérance.
En 1695, Louis XIV ordonna le bombardement de la ville : la place entière, à l’exception de l’hôtel de ville, fut incendiée. N’écoutant que leur courage, les Bruxellois retroussèrent leurs manches et bâtirent ce chef-d’œuvre de pierre en quelques années. Véritable cœur de la ville, cette place est à admirer façade par façade !
Notons que l’Unesco a inscrit la Grand-Place de Bruxelles au Patrimoine mondial de l’humanité. Un choix on ne peut plus judicieux.
Avis aux visiteurs : la place mérite d’être découverte à la tombée du jour, lorsque les dorures et la flèche de l’hôtel de ville, magnifiés par les éclairages, se profilent sur le bleu intense du crépuscule bruxellois. A contrario, une visite matinale au milieu des camions de livraison risque d’occasionner une petite déception…
Grand-Place, Anvers – Belgique
La Grand-Place d’Anvers, ou Grote Markt en néerlandais, date de la Renaissance. Au centre, une fontaine monumentale de Jef Lambeaux représente un Brabo de bronze lançant vers le fleuve la main du géant Antigoon. Ce dernier demandait un important péage à tous ceux qui voulaient remonter le cours de l’Escaut. Ceux qui ne payaient pas avaient les mains tranchées… Silvius Brabo, un jeune soldat romain, vengea donc les victimes !
Le triangle de la Grand-Place est entouré par les maisons des guildes (associations de marchands). Au n°5, le bâtiment qui abrite le café Den Bengel était le siège des tonneliers : on distingue, au sommet, la statue de leur patron, saint Matthieu. Le n°7, qui porte une statue de Saint Georges, hébergeait les réunions des arbalétriers. Le n°38 accueillait la corporation des drapiers. Et quant au n°40, la maison Roodenborgh, elle passa des mains des tanneurs et des cordonniers à celles des charpentiers. On comprend leur convoitise : la façade baroque est la plus belle de la place.
Piccadilly Circus, Londres – Angleterre
Il suffit presque de passer à Piccadilly Circus (comme 34 millions de piétons chaque année !) pour dire que l’on a vu Londres. Cette place bruyante aux panneaux publicitaires tapageurs est connue dans le monde entier.
On est loin de l’œuvre initiale de l’architecte John Nash, qui proposa au début du XIXe siècle d’aménager un axe triomphal reliant le Mall à Regent’s Park en passant par Piccadilly Circus et Regent’s Street. Aujourd’hui, le visiteur remarque davantage les néons des centres commerciaux et le brouhaha des taxis et des autobus que les élégantes façades de stuc blanc. Pourtant, ces petits défauts n’ont pas encore réussi à nuire à la popularité du quartier…
L’ange d’aluminium surplombant la fontaine a été baptisé Eros par les Londoniens. Il symbolise en fait l’ange de la charité chrétienne, en souvenir du comte de Shaftesbury qui se préoccupa au siècle dernier du sort de la classe ouvrière. Anecdote étonnante, cet Eros était autrefois pointé vers Shaftesbury Avenue, où vivait le fameux comte. Mais il fut déplacé pendant la Seconde Guerre mondiale, pour indiquer le Dorset où habitait sur la fin de sa vie ce pieux personnage !
Piazza Navona, Rome – Italie
Elégante, extravagante, ensorcelante, la belle piazza Navona est l’un des théâtres en plein air les plus captivants de Rome.
Elle fut construite à l’emplacement de l’ancien stade de Domitien, qui date du Ier siècle après JC. Un stade de bonne taille (276 mètres de long pour 54 mètres de large), qui pouvait accueillir près de 30 000 spectateurs ! L’empereur y organisait des jeux « à la grecque » (entendez non-violents) : compétitions sportives, concours de poésie et de musique…
Voilà donc une origine possible du nom de cette célèbre place : « in agone » (en compétition) serait devenu, avec le temps, Navona. Selon une autre théorie, elle tirerait son nom de « nave », navire, en raison de sa forme étroite et allongée.
Délaissée jusqu’au XVème siècle, la place fut réhabilitée par les papes et métamorphosée grâce au génie créatif d’architectes baroques comme le Bernin ou Borromini.
Aujourd’hui, elle est entourée de bâtisses des XVIIème et XVIIIème siècles, sans oublier bien sûr la chiesa Sant’Agnese et la célèbre fontaine centrale. Un petit paradis pour les touristes. Notons que c’est dans l’une des demeures de cette place que fut tourné le chef-d’œuvre d’Ettore Scola, Une journée particulière, avec Sophia Loren et Marcello Mastroianni.
Place Saint-Pierre, Rome – Italie
La place Saint-Pierre de Rome, située au Vatican, s’étend au pied de la basilique Saint-Pierre, la plus grande jamais construite. Légèrement ovale, cette place imposante a été commandée par le pape Alexandre VII au Bernin. Ce dernier conçut un véritable chef-d’œuvre d’harmonie : des portiques en forme de bras entourent la place, donnant le sentiment d’accueillir la foule. Ainsi reliée à la basilique, la place Saint-Pierre semble en être le vestibule.
Au centre se dresse l’obélisque du Vatican, qui ornait autrefois le cirque de Néron. Il fut transféré à sa place actuelle au XVIe siècle. Entre l’obélisque et chacune des fontaines, un disque sur la chaussée marque le point d’où vous ne voyez qu’un seul rang de colonnes au lieu de quatre.
C’est sur la place Saint-Pierre que se réunissent les croyants qui souhaitent recevoir la bénédiction urbi et orbi du pape à l’occasion des grandes fêtes religieuses.
Piazza San Marco, Venise – Italie
La réputation de la place Saint-Marc n’est plus à faire : ce petit bijou de la cité des Doges est connu dans le monde entier. Vous noterez d’ailleurs que c’est la seule piazza de Venise. Toutes les autres sont appelées campo.
C’est par ici que l’on débarquait à Venise jusqu’au XIXe siècle, avant que ne soit construit le raccordement par la route avec la terre ferme. Le caractère unique de la place vient de la beauté des édifices qui la bordent : basilique Saint-Marc, palais des Doges, tour de l’Horloge et un autre campanile sont autant de merveilles architecturales que vous visiterez dans une atmosphère de faste et de recueillement… C’est aussi le théâtre permanent de toute la vie publique de la cité.
Découvrez-la de préférence le matin ou le soir, après le départ des touristes d’un jour. Et méfiez-vous ! La place Saint-Marc étant le point le plus bas de Venise, elle se retrouve la première sous l’eau quand la lagune déborde lors du phénomène d’acqua alta… De novembre à avril, pensez à emporter des bottes.
Piazza della Signoria, Florence – Italie
Autrefois, la Piazza della Signoria (place de la Seigneurie) était le cœur palpitant de la cité. Toute l’histoire de Florence se résume en cette place. Construite entre le XIIe et le XIVe siècle, elle fut depuis le théâtre de rassemblements populaires, de révolutions, le cadre de supplices (Savonarole y fut torturé et brûlé en 1498) et le décor de fêtes somptueuses.
D’un côté, elle est dominée par le majestueux Palazzo Vecchio, et de l’autre, par la Loggia dei Lanzi, où plusieurs statues d’un intérêt majeur sont exposées. On peut penser au fantastique Persée en bronze de Benvenuto Cellini, et à l’Enlèvement des Sabines de Giambologna.
Admirez également, sur la place, la statue équestre de Cosme Ier de Médicis de Giambologna, Judith et Holopherne et le Marzocco de Donatello, la fontaine de Neptune, le David de Michel-Ange, et Hercule et Casus de Bandinelli. Des œuvres toutes plus belles les unes que les autres.
Plaza Mayor, Madrid – Espagne
Superbe place construite entre 1617 et 1619, la Plaza Mayor est le symbole de l’architecture du Madrid de los Austrias (« le Madrid autrichien »). Cette place a servi de scène pour les autodafés, de théâtre pour les pièces religieuses de Lope de Vega, de décor aux exécutions criminelles ou d’arène pour des corridas. C’est ici qu’ont lieu, aujourd’hui encore, de nombreuses manifestations populaires.
L’architecture est assez dépouillée. De grandes arcades voûtées communiquent avec les principales rues voisines. Sur la place, on peut voir la casa de la Panaderia (boulangerie) et la casa de la Carniceria (boucherie), qui portent toujours leur nom respectif, ainsi que de belles maisons à portique. Au n°30, on trouve l’une des plus anciennes boutiques de sombreros de la ville !
L’été, c’est un lieu de rendez-vous très populaire. On prend le café au soleil, entre amis, au milieu des bateleurs de rue en tout genre, musiciens, mimes etc. En décembre, elle accueille un sympathique marché de Noël.
Alexanderplatz, Berlin – Allemagne
Située dans le quartier de Mitte, la place historique de Berlin, surnommée « Alex », était il y a bien longtemps un marché à bestiaux. Elle ne reçut son nom définitif qu’en 1805, à l’occasion de la visite du tsar Alexandre Ier.
Les deux siècles qui suivirent transformèrent radicalement le visage de l’Alexanderplatz. Des immeubles, des ateliers et des commerces s’y installèrent, suivis de près par les lignes de métro, de tramway et de bus. Avant-guerre, cette place servait de lieu de rendez-vous aux ouvriers berlinois, qui venaient boire un verre ensemble dans l’un des nombreux bistrots du coin. Malheureusement, les bombardements d’avril 1945 la transformèrent en champ de ruines.
Devenue le cœur de Berlin-Est, sa reconstruction fut confiée à des architectes adeptes du style soviétique : dans les années 1960, l’esplanade prit des dimensions surhumaines et des buildings plus ternes les uns que les autres furent bâtis tout autour. A la réunification de l’Allemagne, le gouvernement décida de remédier au problème. Depuis, rien de nouveau : le chantier a été repoussé à 2020.
Un petit tuyau : l’horloge universelle Urania, qui indique les fuseaux horaires des principales villes du monde, est un lieu de rendez-vous très usité des Berlinois. Alors, si on vous dit « à 16 heures sous l’horloge », vous saurez où vous rendre !
Place de la vieille ville, Prague – République Tchèque
La vieille ville de Prague (Stare Mesto, en tchèque) se blottit au creux d’un coude de la Vltava et offre au visiteur 1000 ans d’histoire et de nombreux clins d’œil architecturaux. La place de la vieille ville (Staromestske namesti) est le cœur de la cité, qui abrita tant de moments historiques : décapitation des 27 principaux responsables de l’insurrection contre les Habsbourg en 1621, discours de Klement Gottwald annonçant la victoire des travailleurs le 21 février 1948 (le célèbre « coup de Prague ») et proclamation en 1990 par Vaclav Havel du retour à la démocratie.
Fabuleux décor de théâtre avec ses maisons aux styles hétéroclites dominées par les tours de Notre-Dame-du-Tyn et de l’hôtel de ville, cette place est le plus parfait reflet de l’extrême diversité architecturale de la cité.
L’été, elle se garnit de terrasses accueillantes (mais chères !) et s’égaye d’ensemble musicaux ou de solistes qui se produisent dans une joyeuse cacophonie.
Place Rouge, Moscou – Russie
Voici l’une des plus célèbres places du monde ! La Place Rouge de Moscou vous fera rêver à coup sûr. Il s’y est déroulé tant de choses, et elle véhicule tant d’histoires… Peut-être faut-il d’ailleurs préciser que le rouge n’a rien à voir avec la révolution prolétarienne, mais veut tout simplement dire « beau » en slavon.
Cette place date de la construction de l’enceinte du Kremlin par Ivan III (au XVe siècle). A cette époque, elle fut baptisée le Torg (le marché) car seules de petites baraques en bois s’installèrent sur son pourtour. Il fallut attendre le XVIe siècle pour que les premiers commerces y soient construits. Dès 1555 s’élève, au sud, la basilique Basile-le-Bienheureux. Au nord, on construit ensuite l’église de l’Icône-de-la-Vierge-de-Kazan. Au XVIIIe siècle, la place se trouve presque totalement urbanisée, même le long des murs du Kremlin.
Après la défaite de Napoléon Ier, elle devient le symbole de la résistance du peuple russe. La statue de Minine et Pojarski, héros de la guerre contre les envahisseurs polonais en 1612, est érigée en 1818 : elle témoigne parfaitement de ce nouvel élan nationaliste. La guerre aura également bouleversé le visage de la Place Rouge : les commerces détruits ne seront pas reconstruits, mais d’élégantes galeries sur colonnades sont édifiées à leur place. Le fameux grand magasin Goum ouvre ses portes en 1893.
En 1918, nouveau bouleversement ! La place se transforme en symbole de la révolution triomphante, avec comme axe principal le mausolée de Lénine et le cimetière des héros révolutionnaires et des grands hommes d’Etat. Elle devient le lieu privilégié des défilés et parades militaires. Mais elle accueille également toutes sortes de contestataires : militants des Droits de l’Homme, syndicats libres, minorités et religions persécutées se rendent sur place en espérant attirer l’attention sur eux.
Depuis l’effondrement de l’URSS, la Place Rouge a retrouvé sa vocation historique… et touristique ! L’hiver, lorsque la place est vide et tapissée de neige, c’est une pure merveille.
Place du Palais, Saint-Pétersbourg – Russie
Immense ? Non, gigantesque ! La place du Palais de Saint-Pétersbourg relègue la place de la Concorde au rang de bac à sable. C’est ici que se dresse l’Ermitage, le plus grand musée du monde par l’étendue de ses collections avec 2,7 millions d’objets répertoriés. Il occupe quatre édifices baroques : le palais d’Hiver, le Petit Ermitage, le Nouvel Ermitage et le théâtre.
Le plus ancien des monuments encadrant la place est le Palais d’Hiver, construit au milieu du XVIIIe siècle sur l’ordre de l’impératrice Elisabeth Petrovna. Très riche, il a conservé son aspect purement baroque, avec sa double rangée de colonnes et de piliers aux chapiteaux dorés, ainsi que sa corniche décorée de personnages de bronze allégoriques. Ce qui frappe, c’est qu’on a su donner de justes proportions à ce palais complètement délirant !
Avec du recul, on devine la coupole dorée de la chapelle, enserrée dans les bâtiments du palais. Retournez-vous. L’édifice au sud, qui abritait l’état-major au temps des tsars, fut dessiné par Carlo Rossi au XIXe siècle. L’arche centrale, monumentale, est coiffée d’une Victoire sur son char, élevée après les guerres napoléoniennes.
Au centre de la place, la colonne d’Alexandre atteint 48 mètres de hauteur ! Elle fut érigée en 1830 à la demande de Nicolas Ier, pour commémorer son prédécesseur. Au sommet trône un archange dont le visage serait celui d’Alexandre Ier lui-même. Mais il est tellement haut que seuls les pigeons doivent pouvoir le reconnaître !
Jemaa-el-Fna, Marrakech – Maroc
La signification du nom « Jemaa-el-Fna » semble plutôt lugubre. Il pourrait se traduire par « assemblée des morts », en mémoire de l’époque où les criminels y étaient exécutés, ou par « place du Néant », ou encore par « place de la Mosquée-Anéantie », en référence à une mosquée de l’époque saadienne. Et pourtant, c’est aujourd’hui l’endroit le plus vivant de tout Marrakech !
La place Jemma-el-Fna s’anime le soir venu. C’est un lieu magique, peuplé d’ « ambulants » en tout genre : conteurs, diseuses de bonne aventure, charmeurs de serpent, musiciens gnaouas, guérisseurs, femmes proposant des tatouages au henné, et au centre, le soir, des dizaines de restos avec des tables étroites et des bancs pour un repas sur le pouce. On pourrait passer des heures à contempler cette incroyable faune humaine, ce théâtre de rue des plus sensationnels.
Depuis 2001, elle a été classée par l’Unesco « chef-d’œuvre du patrimoine oral de l’humanité ». Et on comprend pourquoi ! Ce n’est pas son architecture, plutôt banale, mais son ambiance qui fait de cette place une pure merveille. Paul Bowles n’a-t-il pas dit : « Sans la place Jemaa-el-Fna, Marrakech ne serait qu’une ville ordinaire » ? N’hésitez pas à monter à la terrasse du Grand Balcon Café Glacier ou de l’hôtel de France (attention, conso obligatoire), qui offre le meilleur point de vue sur la place.
Place du Reghistan, Samarcande – Ouzbékistan
La place du Reghistan est le cœur battant de Samarcande, en Ouzbékistan. Il est bon de savoir que la ville toute entière a été classée, en 2001, carrefour des cultures et site du patrimoine mondial par l’Unesco. Le nom de « Reghistan » signifie « place de sable ». On raconte que le sable y était étanché, afin de masquer le sang des victimes des exécutions publiques. Cette pratique ne prit fin qu’en 1920 lorsque le dernier émir fut détrôné.
Bien avant l’invasion mongole (1220), elle servait de place du marché. On y organisait également de nombreuses manifestations, des cérémonies, des défilés militaires… C’est le petit-fils de Tamerlan, Oulougbek, qui transforma la place en un grand centre politique et culturel. En 1417, il fit construire une medersa à son nom, qui accueillait une centaine d’étudiants.
En privilégiant l’astronomie et les mathématiques, Oulougbek fit de la place du Reghistan un symbole de grandeur scientifique. Au XVIIe siècle, le gouverneur de la ville, Yalangtouch Bakhadur, édifia à son tour deux médersas : Chirdor et Tilla Kari. Ces monuments imposants étonnent par leur perfection architecturale, que le temps n’est pas parvenu à entamer.
Mais la place du Reghistan n’est pas célèbre uniquement pour ses superbes bâtisses, qui comptent parmi les plus majestueuses de l’Asie centrale et de l’Islam. C’est aussi un lieu plein de vie, où sont organisés chaque soir des spectacles féériques.
Tian’Anmen, Pékin – Chine
Couvrant 40 hectares, la place Tian’Anmen est la plus étendue du monde. C’est aussi le cœur de Pékin et de la dictature communiste. Mao réaménagea la place de fond en comble pour qu’elle symbolise la puissance du régime, grâce à des bâtiments de style stalinien : de part et d’autre s’élèvent le palais de l’Assemblée du Peuple et le Musée national.
Au centre trône le mausolée du président Mao. La foule de touristes, d’écoliers et de provinciaux qui rend quotidiennement hommage au président-dictateur témoigne que son image est toujours aussi forte. Au sud, la porte Face au Soleil et la porte Qianmen séparaient autrefois la ville tartare de la ville chinoise.
Cette place fut le théâtre désolant d’une répression brutale et disproportionnée : le 4 juin 1989, des chars en délogèrent des milliers d’étudiants pacifiques venus manifester leur opposition au régime. Un bras de fer largement gagné par les forces armées, qui écrasèrent les barricades, quelques manifestants au passage, et ouvrirent le feu sur la foule désarmée. Mais n’allez pas disserter avec des badauds de ces évènements : la place grouille de policiers en uniforme et en civil !
Texte : Camille Poirier/www.routard.com